Emil Cioran Notebooks in English


emile cioran spiral

In process of translating Emil Cioran’s journals from French to English. Original French is included underneath each entry.

In this post are entries for year I am presently translating. Every week I translate another entry, usually work on carefully, over a few days.

Listed below are links to latest entry fully translated and years already completed.

1961


8 avril 1961

I am today 50 years old.

It is act of a vain man to grow his misfortunes. One only earns money at the price of honor.

I have been disgusting all my life. The attention that I have dedicated to my ills allowed me to exorcise the demon of boredom. I would have been a busy man despite everything.

However hard I try, leaden blood pulls me down.

Read a life of Marat. What a mistake to think that the “possessed” are a Russian specialty.

No one as much as me has set such high standards for indifference. But I aspired there passionately, frenetically, so that the more I wanted to attain it, the further I moved away from it. Such is the result one arrives at when has an ideal that is the antithesis from what one is. To achieve my ends, I have inevitably erred in means and method, I have always taken the longest and most complicated detour.

Our repressed prayers turn into sarcasm.

When one is incapable of indifference, one can’t live without imploring.

The soul is an eternal crucifixion.

Original French

J’ai aujourd’hui cinquante ans !

C’est le fait d’un vaniteux que de grossir ses malheurs. On ne gagne de l’argent qu’au prix de l’honneur.

Égrotant, toute ma vie je l’ai été. L’attention que j’ai vouée à mes maux m’a permis d’exorciser le démon de l’ennui. J’aurai été un homme occupé malgré tout.

J’ai beau m’élancer, un sang de plomb me tire en bas.

Lu une vie de Marat. Quelle erreur de penser que les « possédés » sont une spécialité russe.

Nul autant que moi n’a mis aussi haut l’indifférence. Mais j’y ai aspiré passionnément, frénétiquement, de sorte que plus je voulais y atteindre, plus je m’en éloignais. Tel est le résultat auquel on arrive quand on se fait un idéal à l’antipode de ce qu’on est. Pour parvenir à mes fins, je me suis immanquablement trompé de moyens et de méthode, j’ai toujours emprunté le détour le plus long et le plus compliqué.

Nos prières refoulées se muent en sarcasmes.

Quand on est inapte à l’indifférence, on ne peut vivre sans implorer.

L’âme est un éternel crucifiement.


Translated
Still to Translate
5 mai 1961

À la bibliothèque de l’institut catholique, je lisais un livre

de Pierre de Labriole. Soudain– tout s’évanouit autour de moi, et je fus en plein « amok » surplace.

Ma  totale  inadhérence  au  monde,  je  n’ai  pas  la  consolation  ou l’échappatoire de croire qu’elle vient de l’orgueil ; non, elle dérive de tout ce que je suis – de tout ce que je ne suis pas.

Mon goût va aux raccourcis, aux formes ramassées, aux inscriptions funéraires de l’Anthologie.

Je ne suis pas un écrivain, je ne trouve pas les mots qui conviennent à ce que je ressens, à ce que j’endure. Le « talent », c’est la capacité de combler l’intervalle qui sépare l’épreuve et le langage. Pour moi, cet intervalle est là, béant, impossible à remplir ou à escamoter. Je vis dans une tristesse automatique, je suis un robot élégiaque.

La négation chez moi n’est jamais sortie d’un raisonnement, mais d’une sorte de désolation primordiale, les arguments sont venus après,pour l’étayer. Tout non est d’abord un non du sang.

Lady Macbeth, la Brinvilliers – des femmes selon mon cœur. Tl y a dans les moments de découragement profond je ne sais quelle nostalgie de la cruauté.


27 mai 1961

Le Requiemde Mozart. Un souffle de l’au-delà y plane. Comment croire, après une pareille audition, que l’univers n’ait aucun sens ? Il fautqu’il en ait un. Que tant de sublime se résolve dans le néant, le cœur, aussi bien que l’entendement, refuse de l’admettre. Quelquechosedoit exister quelque part, un brin de réalité doit être contenu dans ce monde. Ivresse du possible qui rachète la vie. Craignons le retombement et le retour du savoir amer.

Je ne peux écrire qu’en état de passion ; et je fuis les passions. Mon acharnement à l’indifférence me réduit à la stérilité.

Dès que j’entrevois une certitude, mille doutes se profilent à l’horizon, qui la recouvrent et l’étouffent avant qu’elle ait la possibilité de s’affirmer, de décliner son nom…

Je ne crois à aucun acte, et cependant dès que je me lance dans une entreprise et la mène à bien, quelle satisfaction !


image

D’Original Français ici:

Comments

8 responses to “Emil Cioran Notebooks in English”

  1. When will the new version be updated?

  2. Bettina Hodge

    honestly it’s a wake-up call.

  3. future fly

    We support

  4. Dustin Sigaty

    This is incredible!! Thank you for embarking on this project!

  5. how-to-kill-yourself

    You are not without options

  6. Andrew Winer

    I hope you will keep translating!

  7. “Once in a Fairy Tale”

  8. appreciate will keep checking

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.